La Mule

La Mule

USA, C. Eastwood, 2019
Note : 3.5 / 5 – Bien

Clint Eastwood est un grand cinéaste, portraitiste formidable de la société américaine et de ses maux. Mais voilà qu’à 88 ans son état d’esprit réactionnaire de toujours semble, un peu plus qu’avant, prendre les devants dans les histoires qu’il nous narre. Cette fois-ci il en a après les nouvelles technologies qu’il vilipende de manière insistante. Mais le récit, qu’il tricote autour de cette histoire de narco-trafic, est vraiment très malin et ne nous emmène absolument pas là où on pouvait l’attendre. Notamment parce que le film était présenté comme le parent de Gran Torino, qui se terminait lui dans un fracas inoubliable. Cette fois-ci Clint remballe les armes et nous propose un long-métrage centré sur la thématique familiale. Son scénario ne cesse de rappeler la valeur des liens filiaux que son personnage a trop délaissé durant sa vie dédiée au travail. S’en suit une fuite en avant, en forme de suicide affectif, qui n’est pas dénuée d’intérêt. On regrettera cependant la présence trop faible à l’écran de l’excellent Bradley Cooper, alors qu’Eastwood est de tous les plans. On saisit aussi peu clairement la transition entre les deux états d’esprits opposés qui conduisent le principal protagoniste à devenir cette mule pour le cartel. Il y a bien cette ellipse temporelle de douze ans mais elle ne permet pas assez bien de percevoir les changements de ressentis chez l’homme. Malgré ces quelques réserves, le réalisateur parvient à installer une formidable tension qui monte crescendo et préserve le suspens jusqu’au final. Moins inspiré que lors de quelques-unes de ses dernières sorties (Sully, American Sniper, J. Edgar), Clint Eastwood a pris le parti de regarder derrière et nous propose un joli film en forme de contre-pied final.

R.M.